LES REPRESENTANTS DU PEUPLE EN MISSION : UNE ICONOGRAPHIE CONTROVERSEE
Dès l’an II, l’imagerie et l’iconographie s’empare doucement de l’image des représentants du peuple en mission. La première iconographie est celle du portrait. Ces derniers sont faits par des artistes, sur commande des représentants concernés, avec comme but celui de rendre compte de sa situation présente à sa famille, tel le portrait de Milhaud. L’image du représentant du peuple est aussi véhiculée par la propagande officielle afin de montrer un représentant du peuple en uniforme, figurine anonyme de Duflos destinée à la propagande du Gouvernement par la prestance de l’uniforme comme le fera Martinet sous le Premier Empire. Vient par contre, dès l’an III et la réaction thermidorienne, une vague iconographique bestiale ou le représentant devient une incarnation hideuse du Mal diabolique se gargarisant de sang.
C’est surtout le XIXe siècle qui va produire une iconographe romantique sur les représentants du peuple en mission. Romantisme morbide avec l’image du représentant tiré à quatre épingles, solitaire, regardant une victime partir à l’échafaud sans sourciller, comme le montre le sculpteur Massard alors que Charlet montre un représentant du peuple fantasmé comme un vieux sage presque fantomatique, droit et débraillé sur son cheval aux yeux agars, au milieu des fracas de la guerre. L’image la plus neutre et la moins romantique est celle de Philippoteaux montrant un représentant du peuple aux armées dans une posture napoléonienne, image rassurante de celui qui assume, vers des fascines, lieu d’exercice de son pouvoir. Tous ont en point commun l’habit et le gilet ouverts sur la chemise à cravate noire et le chapeau noir relevé avec le plumet tricolore, image populaire alors que l’iconographie de la Révolution et le texte décrivant l’uniforme montre un haut de forme ceint de tricolore d’où émane le plumet. C’est aussi sans compter sur un représentant semblant un jeune homme à la posture presque efféminé imprimé par Camus. A côté de ces standards fantasmés et devenus réalités du représentant du peuple en mission s’ajoute celui de la physionomie. Ainsi, même Detaille, pourtant peintre militaire très pointilleux sur l’uniformologie, se laisse allez à dessiner un représentant du peuple en mission pouvant faire penser à un Lebon, alors que celui édité par le chocolat Lombard montre un représentant avec les traits moustachus d’un Custine. C’est donc compter avec les représentations d’hommes célèbres en tenue de représentants du peuple qui jouent encore plus souvent sur l’image romantique et destructrice que la réalité uniformologique, tel Collot d’Herbois, en représentant débraillé à l’air jouisseur sur les ruines d’une ville comme le représente Leguay. Toutefois au tournant des XIXe et XXe siècles, l’image de certains représentants du peuple vont servir la propagande patriotique, tel Carnot représenté à la tête des armées à Wattignies par Moreau de Tours. L’illustration du XXe siècle n’oublie pas les représentants du peuple aux armée ou dans les départements et reprend le plus souvent, encore une fois, les clichés romantiques du XIXe lorsqu’elle ne tombe pas dans la caricature thermidorienne. Ainsi le tome 5 de la bédé Timon des Blés croque un représentant du peuple réunissant tout les vices : manchot, voleur, menteur, lâche et sanguinaire : le panégyrique des clichés sur le sujet.
Jérôme Croyet
Docteur en Histoire, président-fondateur de la SEHRI